Numéro #4 – Le socialisme face aux rivalités mondiales

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ÉDITO – Le socialisme face aux rivalités mondiales

Nathan Cazeneuve, Alexandre Escudier et Emmanuel Phatthanasinh

Les grandes tendances mondiales par rapport auxquelles doit se définir un projet européen social-démocrate sont, d’un côté, la rivalité entre la Chine et les États-Unis, et ce qu’elle implique en termes de compétition technologique et de remise en cause de la mondialisation. D’un autre côté, les défis écologiques que sont les effets du réchauffement climatique sur les rendements agricoles, l’amenuisement des ressources énergétiques fossiles et la vulnérabilité épidémiologique de la population mondiale.

 

La mondialisation a déjà survécu au populisme – et elle peut le faire de nouveau

Suzanne Berger

Le tournant protectionniste des États-Unis engagé sous la présidence Trump et non encore démenti par celle de Biden rappelle la réaction des gouvernements américains à la première mondialisation (1870- 1914). Celle-ci nous enseigne que pour être acceptable, la mondialisation doit aller de pair avec une réelle représentation des travailleurs, des concessions à ses opposants, et un programme de réforme sociale ambitieux.

 

« Il faut construire un marché du travail dans la zone euro »

Entretien avec Xavier Ragot

Une analyse de la zone euro par le seul prisme de l’ « ordolibéralisme » est insuffisante, car elle masque la persistance des capitalismes nationaux et la mise en place de politiques européennes volontaristes pour les faire converger par le haut. Une politique européenne du travail consoliderait cette tendance.

 

Le capitalisme de plateforme, une question de pouvoir

Robert Boyer

Les nouvelles technologies numériques sont au cœur d’une mutation du capitalisme, notamment aux États-Unis et en Chine, et renforcent les dynamiques de constitution d’oligopoles, voire de monopoles. Trois scénarios futurs se dessinent : ou bien l’hégémonie mondiale d’un capitalisme transnational, ou bien l’institution de l’information comme Commun, ou enfin le développement d’un capitalisme étatique de surveillance.

 

« Les institutions européennes où se bâtit une expertise n’évacuent pas le politique, mais le mettent à sa place »

Entretien avec Jean-Marie Guéhenno

Le triptyque paix-prospérité-démocratie est remis en cause par l’émergence de la Chine et l’affaiblissement interne des démocraties occidentales. Mais l’Europe dispose des ressources humaines pour articuler de manière équilibrée le niveau de l’expertise et celui de la politique.

 

Enjeux politiques des rivalités technologiques sino-américaines. La High-Tech, le piège de Thucydide et le reste du monde.

Cyrille Bret et Florent Parmentier

La rivalité mondiale entre la Chine et les États-Unis se décline en grande partie dans le champ technologique. L’essor des capacités chinoises en Recherche et Développement a permis, dans certains domaines, un rattrapage voire un dépassement des technologies américaines. La masse de l’économie chinoise lui octroie de ce point de vue un avantage comparatif certain. Les effets d’intégration économique produits par les technologies de pointe constituent un enjeu géopolitique majeur, en poussant toujours davantage les pays tiers à s’aligner sur l’une ou l’autre de ces deux puissances numériques.

 

Relocalisation, réindustrialisation : quels leviers pour recréer de l’emploi ?

Caroline Mini

Le débat sur la souveraineté industrielle de la France s’est dernièrement réorganisé autour des notions de relocalisation et de réindustrialisation. Si les relocalisations ont du sens, elles ne suffisent pas à recréer massivement de l’emploi. La réindustrialisation en revanche, définie comme le développement des capacités existantes, semble plus prometteuse. Elle requiert néanmoins de tirer parti de la transition énergétique et d’anticiper les besoins en formation.

 

Les défis de la renaissance industrielle

Anaïs Voy-Gillis

La réindustrialisation et la relocalisation sont des leviers pour l’indépendance stratégique, le redressement de la balance commerciale et la lutte contre le réchauffement climatique. Encore faut-il harmoniser ces différents enjeux, ce qui se fera difficilement sans l’intervention de la puissance publique.

 

Pourquoi la gauche devrait prendre au sérieux le déficit commercial

Benjamin Brice

La gauche abandonne généralement le thème du déficit commercial aux représentants du centre et de la droite. C’est probablement une erreur, car cette question touche à des problèmes décisifs : la surconsommation de produits industriels, le manque de crédibilité de la France au sein de l’Europe, les déséquilibres entre classes sociales ainsi qu’entre territoires, et le manque de moyens pour financer les services publics et l’investissement.

 

« La première urgence politique est de se projeter, à cause du climat ou du pic pétrolier, vers une sobriété inexorable »

Entretien avec Matthieu Auzanneau

Au siècle dernier, le pétrole a permis une expansion sans précédent de la puissance humaine, et conditionne encore aujourd’hui le développement de nos économies et des rapports géopolitiques. La chute de la production pétrolière mondiale et le dérèglement climatique nous nécessitent de planifier un fonctionnement plus sobre de nos sociétés.

 

La (re)localisation du monde

Cyrille Coutansais

Le progrès des technologies numériques permet de prévoir la fin de l’ « économie du lego », c’est-à-dire de la dispersion des chaînes de production entre plusieurs pays. La relocalisation de la production implique la mise à disposition d’une énergie électrique importante et durable, ainsi qu’une meilleure valorisation matérielle et énergétique des déchets.

 

Comment protéger nos filières stratégiques ?

Marc-Alexandre Allais

La capacité de produire certains biens sur le territoire national, notamment dans les domaines militaire, énergétique, sanitaire, agricole ou numérique, est une condition de l’indépendance stratégique du pays. Il importe de contrôler les investissements étrangers dans ces filières et de permettre des investissements publics pour les renforcer.

 

La mondialisation vue par des industriels : puissances, vulnérabilités et société

Entretiens avec Pierre-André de Chalendar, Louis Gallois et Olivier Leberquier

Ce texte retrace trois entretiens conduits séparément, en janvier 2022, avec M. Pierre-André de Chalendar, président du groupe Saint-Gobain et co-président de La Fabrique de l’industrie, M. Louis Gallois, ancien président de PSA et co-président de La Fabrique de l’industrie ainsi que M. Olivier Leberquier, président de la Société coopérative ouvrière provençale des thés et infusions (Scop-TI).

 

Une « grande stratégie » de gauche est-elle possible ? Accélération géostratégique et socialisme démocratique

Alexandre Escudier

Les équilibres politiques internes ne sont jamais déliés des contraintes géostratégiques ni des interdépendances géoéconomiques externes. L’histoire de la gauche est pourtant traversée de cet impensé politique de l’externe. Face aux nouvelles demandes de protection, la doctrine du socialisme démocratique doit être refondée – sauf à sortir de l’histoire – à partir des trois socles fondamentaux des biens politiques premiers que sont les sécurités, le bien-être social et les libertés.

 

Face à la mondialisation : leçons de l’internationalisme d’avant 1914

Bastien Cabot

L’histoire de l’internationalisme est d’abord, à la fin du XIXe siècle, celle de coopérations transnationales entre travailleurs européens pour améliorer les salaires et les conditions de travail, malgré la « nationalisation » des classes ouvrières et la structuration nationale des partis et syndicats. La seconde mondialisation, depuis les années 1970, ne s’est pas accompagnée d’un nouvel internationalisme entre travailleurs.

 

Nations et mondialisation : où est passé l’internationalisme ?

Nathan Cazeneuve

Historiquement, l’internationalisme a accompagné la naissance du socialisme européen, il semble aujourd’hui avoir disparu. Afin d’expliquer cette faiblesse apparente alors même que la mondialisation a renforcé les interdépendances internationales, il faut comprendre que l’internationalisme de la fin du XIXe siècle était d’abord un mouvement de la classe ouvrière. La force des processus d’intégration nationale nous invite à repenser, sur les bases d’une compréhension sociologique des nations, les fondements concrets d’un internationalisme contemporain, conscient tant des interdépendances que des formes de différenciation entre nations.

 

Réalités et limites de l’Europe sociale et environnementale : les socialistes français et l’Europe (1957-1992)

Laurent Warlouzet

Trop souvent réduite dans les discours politiques de gauche actuels à la réalisation d’un projet néolibéral, la construction européenne a reposé sur des compromis politiques, économiques et sociaux entre nations qui ont structuré trois approches différentes : de marché, sociale et de puissance.

 

La mondialisation sans « capitalisme »

Emmanuel Phatthanasinh

Les notions d’ « économie-monde » et de « capitalisme » développées par Fernand Braudel permettent d’analyser la mondialisation comme la domination d’une classe capitaliste sur les flux financiers. Dans ce jeu, la France et l’Europe occupent une position subordonnée.

 

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